Reculer une partie des dépôts d’hydrocarbures de la Pallice pour mieux sécuriser les habitants du quartier est techniquement possible et financièrement coûteux. Telle est la conclusion de l’étude que l’Institut national de l’environnement et des risques industriels (Ineris) a remise – le 27 mars – à la préfète de la Charente-Maritime, Béatrice Abollivier (1).
Ce rapport s’inscrit dans la préparation du Plan de prévention des risques technologiques (PPRT) des sociétés pétrolières Picoty et SDLP que la préfecture veut boucler avant la fin de l’année. Il avait été commandé à l’Ineris, à la demande pressante d’une association du quartier, Respire.
Conclusions attendues
Le rapport ne fait que confirmer ce que personne n’ignorait : déplacer des cuves revient bien plus cher (27,3 millions d’euros) que de déloger leurs plus proches riverains (3 M€). Pour la société Picoty, l’Ineris préconise la suppression de six cuves de gasoil, d’un volume total de 84 775 mètres cubes, compensée par la reconstruction de quatre nouveaux bacs de même contenance au nord du site. La capacité de trois autres cuves serait réduite au moins de moitié.
Pour SDLP ( filiale de Total), moins proche des habitations, la sécurisation de deux cuves, par la mise en place d’une double paroi, suffirait à réduire le risque.
Ce jeu de cuves musicales permettrait de sortir « 16 enjeux » (traduisez des habitations) de la « zone de délaissement » ( comprenez d’expropriation) prévue par le PPRT, lequel concerne au total quelque 500 immeubles et plus de 1 500 personnes. C’est-à-dire que leurs propriétaires ne seraient plus expulsables mais devraient procéder (en partie à leurs frais) à des travaux de sécurité dans leur logement.
« Nous, nous proposons des solutions techniques, confie-t-on à l’Ineris, notre mission n’est pas de les chiffrer. » L’évaluation financière est donc le fait de l’exploitant, la société Picoty. Les 27,3 M€ comprennent la construction des quatre nouvelles cuves pour 22,4 M€ et le démantèlement ou la réduction des neuf anciennes pour 4,9 M€. Soit neuf fois la somme que, selon l’estimation des Domaines, l’État débourserait pour racheter les 16 « enjeux » concernés.
« Une question politique »
27 millions d’un côté, 3 de l’autre. L’association Respire ne veut pas laisser la préfecture résumer le débat à cette simple équation. Elle fait valoir que, pour prix de son investissement, Picoty disposerait de bacs flambant neufs (si l’on ose dire) au lieu de ses anciennes cuves amorties depuis plusieurs crises pétrolières. Elle rappelle aussi que l’évaluation est celle de l’industriel, lequel a tout intérêt à alourdir la facture.
Et puis, ajoute son président, Raymond Bozier, « c’est avant tout une question politique : il faut savoir ce qui est le plus important, des intérêts économiques d’un pétrolier ou de ceux collectifs des habitants de Laleu et la Pallice. »
Jeudi à la préfecture, Raymond Bozier a claqué la porte de la commission de suivi des sites, pour protester contre « l’omnipotence de l’État » qui « considère les riverains comme quantité négligeable. »
(1) Le document est consultable sur le site de la Dreal Poitou-Charentes (Direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement).
Source : Presse productiviste (SO)